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exemple : (oca1584) signifie "
naissance en 1584 environ"

Anne Toussainte
VOLVIRE (de)
02 11 1653
1653
NÉANT-SUR-YVEL (56)
VOLVIRE (de) :: Charles
CADILLAC (de) :: Anne
 - sans postérité

RESUMÉ Anne de Volvire eut douze frères ou soeurs : parmi ses frères, quatre furent officiers et un prêtre ; parmi les soeurs, quatre furent Ursulines à Ploërmel ou à Muzillac, et deux Bénédictines à Saint-Georges de Rennes. Anne fit sa première communion à Néant le 24 mai 1664, et entra en octobre suivant comme élève chez les Ursulines de Ploërmel, dont était alors supérieure Jacquette de la Bourdonnaye. Elle revint en 1667 au Bois-de-la-Roche, où sa tante acheva son éducation, et la conduisit en 1670 à Paris, où l’on fit son portrait. Anne était alors une jolie jeune fille de dix-sept ans, instruite, enjouée, spirituelle, et de plus une des plus nobles et des plus riches héritières du pays ; aussi les soupirants ne manquaient pas. Un jour d’automne de l’année 1670, à une chasse à courre, le cheval de Mlle de Volvire s’emporta à la sortie du parc du Bois-de-la-Roche et alla se précipiter dans un ravin de soixante pieds de profondeur, au bas duquel coule la rivière d'Yvel. La jeune fille fut sauvée miraculeusement ; mais le grand danger auquel elle avait échappé lui fit comprendre la fragilité de la vie et la vanité des plaisirs ; et, renonçant au monde, elle voua sa vie à la pratique de toutes les vertus. Elle fit en 1671 une retraite fermée chez les soeurs de l’hôpital d'En-Bas à Ploërmel ; puis elle alla passer quelque temps à Rennes, d’abord à la Visitation du Colombier, puis, en 1672 et 1673, chez les dames Augustines Hospitalières de l'Hospice Saint-Yves, afin de s’y perfectionner dans l’art de soigner les malades et les blessés. A la fin de 1673, elle revint au Bois-de-la-Roche, et fonda près du château une école et un hôpital. En 1683, elle fit bâtir à Ploërmel, sur un terrain qui lui appartenait au haut du faubourg Grimaud, un hôpital, qui existe, encore de nos jours. Ayant perdu son père en février 1692, elle fit un voyage à Paris pour solliciter l’admission au Collège-Royal de deux de ses neveux, Joseph et Philippe-Auguste de Volvire. Là elle vit un de ses oncles, Alexis de Volvire, Carme en cette ville sous le nom de P. Victor ; et le roi Louis XIV, ayant appris le séjour dans la capitale de celle dont on lui avait dit les qualités et la vertu, la reçut en audience privée et lui remit une somme d’argent pour la continuation de ses bonnes oeuvres. De retour au Bois-de-la-Roche, Mlle de Volvire tomba malade. Elle fit le 10 février 1694 son testament, par lequel elle nommait comme exécuteurs testamentaire François-Gilles de Carné, comte de Trécesson, et l’abbé Joseph-Pierre Ermar de Beaurepaire, recteur de Ploërmel. Elle léguait entre autres 200 livres de rentes à l’hôpital de Ploërmel, qu’elle avait créé. Elle mourut le 20 février, vers midi, et fut, suivant son désir, inhumée le lendemain dans l’église de Néant « au haut des fonds baptismaux, du côté vers le Nord, où est la piscine ». Les pauvres qu’elle avait aimés et secourus durant toute sa vie, tinrent à porter eux-mêmes son corps jusqu’à sa dernière demeure, accompagnés du pays tout entier. Pendant le trajet du château à l’église, les porteurs du cercueil l’ayant posé à terre quelques instants, il jaillit à cet endroit une fontaine qui depuis n’a jamais tari et qui porte le nom de « Fontaine de la Sainte de Néant ». Le tombeau d'Anne de Volvire devint bientôt un but de pèlerinage ; il est encore en grande vénération, et on conserve pieusement la relation de plusieurs grâces, guérison ou faveurs, obtenues par l’intercession de celle qui est toujours honorée sous le nom de la « Sainte de Néant ». Dès la fin du XVIIème siècle, l’évêque de Saint-Malo autorisa le recteur de Néant à faire entourer d’une grille le tombeau d'Anne de Volvire, et le recouvrir d’un dais et d’un pavillon de dix-sept pieds. On peignit aussi son effigie sur le vitrail au-dessus des fonts baptismaux. Quatre-vingt-un miracles furent obtenus par l’intercession de la Sainte de Néant et inscrit dans le cours du XVIIIème siècle sur les registres paroissiaux. Après la tourmente révolutionnaire, l’affluence des pèlerins ne diminua pas ; mais l’évêque de Vannes fit défendre d’inscrire les faveurs obtenues par son intercession, et supprima les ex-voto qui en étaient le témoignage, ainsi que le pavillon qui surmontait le tombeau et les effigies peintes sur le vitrail. Vers 1840, le dais qui recouvrait la sépulture fut recouvert de marbre blanc ; l’ancienne grille fut remplacée par une neuve et la fontaine de la Sainte fut garnie de pierres de granit. DETAILS DE SA VIE Anne-Toussainte de Volvire (dites La Sainte de Néant) Une grande figure de femme, de chrétienne et de duchesse apparut au XV siècle en Bretagne: la bienheureuse Françoise d'Amboise, dont l'Eglise célèbre la mémoire depuis quelques années. Anne-Toussainte de Volvire venait du même sang. Elle descendait aussi des seigneurs de Thouars, du côté paternel, puisque sa famille en était issue Du côté maternel, elle venait également des Montauban. En effet, Béatrice, fille de Guillaume de Montauban, avait épousé, en 1395, Jean III de Rieux, et deux enfants naquirent de ce mariage, François et Marie de Rieux. Or, Marie devint la femme du vicomte de Thouars, et en eut Françoise, qui devint duchesse de Bretagne en s'unissant à Pierre II. Robert de Montauban, qui se maria avec Marie de Saint-Denoual du Bois-de-la-Roche, était frère, ou tout au moins cousin-germain, de Béatrice, aïeule de la bienheureuse Françoise d'Amboise. — C'est ainsi que Anne de Volvire, dont la trisaïeule était une Montauban, se trouvait issue des mêmes souches que la « bonne duchesse Mlle de Volvire de Ruflec ou simplement Mlle du Bois de la Roche, comme on la nommait de son temps, fut baptisée le 2 novembre 1653 dans l'église paroissiale de Néant. Elle reçut les deux noms, Anne Toussainte, (à cause de de la Toussaint) et eut pour parrain et marraine deux honorables paysans très pauvres, Jean Gâpais et Julienne Nouvel, Mlle du Bois de la Roche fut filleule de deux pauvres. Au XVIIe siècle, en effet, « certaines familles illustres, celles de Volvire, de Rohan, de Carcado, de Robien, de Trécesson, de Sérent, etc., se plaisaient à prendre pour parrain et marraine de leurs enfants les petits et les faibles, paysans ou gens du peuple, etc., dont les qualités sont chaque fois soigneusement indiquées dans l'acte de baptême. Ce choix était dicté par un sentiment louable d'humilité ». Des Fonts baptismaux, Mlle du Bois de la Roche fut conduite, selon l'usage d'alors, ce qui du reste se pratique encore dans bien des paroisses, à l'autel du Saint Rosaire, pour être consacrée à la très sainte Vierge et mise sous sa protection. Nul doute que la Vierge Marie agréa cette fleur naissante, ce lys virginal qui allait croître, s'épanouir et mourir parmi les épines, c'est-à-dire les épreuves de la vie. Cependant la cloche bénie, cette voix de Dieu, continuait par ses vibrations à annoncer au pays la naissance de Mlle du Bois de la Roche ; elle jetait la joie dans tous les cœurs. Les seigneurs et dames qui remplissaient l'église, pouvaient eux-mêmes répéter à l'exemple de cette admirable Anne de l'Ancien Testament : « Louons le Seigneur Dieu avec allégresse !... ». Il vient de marquer du caractère ineffaçable l'âme d'une nouvelle élue. Dom Jean Rioux, recteur de la paroisse, achevait l'acte de la cérémonie. Nous avons dit que Mlle du Bois de la Roche fut filleule de deux paysans ; elle-même fut souvent marraine. Enfant, en 1659, nous la trouvons avec son frère Joseph, nommant du nom de « Anne » une cloche dans l'église de Guilliers, à la prière du prieur-recteur de cette paroisse. — Elle tint sa cinquième soeur, Béatrix-Ange, sur les saints Fonts du baptême, en 1665. — L'année suivante, elle signe comme témoin l'acte de baptême de sa sixième soeur, Marguerite-Ange, cérémonie faite à la chapelle du château. Sa signature indique une instruction avancée pour son âge. Etant la filleule de deux paysans, Melle du Bois de la Roche rendit amplement ce bienfait. En 1659, elle tenait sur les Fonts du baptême Toussainte Le Mercier, une paysanne, et l'année suivante François Boisnon, un pauvre ; en 1675, elle était marraine de Anne Coquard, une pauvre, alors que Jean-François d’Andigné, seigneur de Kermagaro, en Néant, fut parrain. III. SA PREMIÈRE ÉDUCATION Madame la comtesse de Volvire se chargeait elle-même de l'éducation première de ses enfants. Cette mère admirable saisissait l'instant où la raison commençait à poindre chez Mademoiselle Anne-Toussainte, son aînée, pour diriger cette lumière naissante dans la connaissance et l'amour de la vérité. Elle lui inspirait la crainte de Dieu avec l'horreur de la moindre duplicité. Ses leçons, comme celles de sa belle-sœur Hélène de Volvire, avaient de la gravité sans manquer de douceur et venaient si à propos et avec tant de charmes que l'enfant les écoutait toujours avec respect. Selon la tradition, en effet, deux de ses frères, entrèrent chez les Pères Carmes, quatre de ses soeurs chez les Dames Ursulines, une chez les Dames Bénédictines où ils sont morts. Son exemple, disons-nous, fut propre à déterminer chacun d'eux à une vocation digne du beau nom qu'ils portaient. C'est ainsi que sa bonne mère, de même que sa tante Hélène de Volvire, lui enseignaient les vérités de la Foi, c'est-à-dire à connaître, à aimer et à servir Dieu et Jésus-Christ, son Fils, à avoir une profonde horreur du mal et de l'attrait pour tout ce qui est bon et juste, à apprécier le prix de son âme et l'importance du salut, à porter ses regards et ses espérances vers les objets éternels, à vivre en un mot de l'esprit de Foi et à se nourrir des préceptes de l'Evangile. Le spectacle de la riante nature servait encore à ces Dames pour élever vers Dieu l'âme de l'enfant, et y faire naître les plus nobles sentiments et les plus profondes impressions. La vue de la forêt de Paimpont et des torrents de l'Yvel élevait et grandissait son esprit. Remarques, réflexions naïves, tout était redressé dans le jugement de l'enfant et ramené doucement à la raison et à la Foi chrétienne. Mais personne, non personne ne remplaçait sa mère près de Mlle du Bois de la Roche : Mme de Volvire avec la sollicitude d'une mère et les idées élevées d'une grande dame chrétienne, s'occupa tout d'abord d'éveiller dans l'esprit de sa fille des pensées nobles et pures Cette éducation toute maternelle pénétra au plus intime de l'âme de l'enfant, y versa en même temps que les connaissances humaines, les sublimes enseignements de l'Evangile, l'instruisit de ses devoirs et la dirigea vers ses destinées éternelles. A cette époque, au XVIIe siècle, les châtelaines visitaient les pauvres et surtout les malades. Mlle du Bois de la Roche accompagnait parfois sa mère ou sa tante dans leurs visites de charité. On la remarquait, on s'arrêtait pour se dire : « Voilà Mlle du Bois de la Roche !.. », comme s'il n'y eût eu qu'elle au château, tellement sa bonté, son humilité, sa gaieté, la pratique des bonnes oeuvres, son zèle naissant du salut des âmes faisaient d'impression sur les cœurs. Elle recherchait les indigents ; ainsi, entendre dire à un pauvre : « La charité, s'il vous plaît, pour l'amour de Dieu », était pour elle un bonheur. Immédiatement ses yeux se tournaient vers son père ou sa mère, ou autres parents qui confiaient à l'enfant une obole à l'adresse du pauvre. Alors, une parole amie sortait de sa bouche à l'instant où sa main présentait l'aumône demandée : elle avait appris que le superflu du riche appartient au pauvre. Plus tard, en se promenant dans le parc du château, elle, esprit réfléchi, on pourrait d'ire presque mûr, avait sous les yeux les neuf tours couronnées de créneaux, à l'intérieur desquelles étaient suspendues les armes des vaillants, ses ancêtres. « Mon âme, se dit-elle, fortifiée par l'usage des sacrements, peut fuir le mal, et opérer le bien partout où la Providence m'en fournira l'occasion ». En effet, Mlle du Bois de la Roche vécut dans le monde, s'y prêtant mais ne s'y donnant pas ; elle fut assujettie aux nécessités de la vie et entourée de ses embûches et de ses périls ; mais partout la Loi de Dieu, même les conseils évangéliques, furent son appui et la règle de sa conduite : c'étaient pour elle les armes des forts qu'elle savait manier pour défendre son âme.. Ainsi ces nobles et honorables châtelains élevaient leurs enfants ; et, la journée close, la famille se réunissait à l'Oratoire du château, puis le son de la cloche annonçant la prière Rassemblait devant Dieu la maison tout entière. Nous ignorons complètement l'existence de Mlle du Bois de la Roche comme pensionnaire des Dames Ursulines de Ploërmel (1664-65-66-67). Elle fut, sans aucun doute, la continuation de l'éducation maternelle et de l'instruction reçues au château de son père, et perfectionnées plus tard. Elle ne dut pas quitter cet asile, où fleurit l'innocence, avant que la sagesse eût formé son cœur. Mais n'empiétons pas, et voyons-la se préparer à sa première communion. « Venez tous à moi, dit Jésus-Christ ». A cette époque, en 1664, faut-il le rappeler ici ? Le livre Augustinus et la doctrine qui en découle avaient quitté la Belgique pour se répandre en France, même dans la Bretagne si chrétienne. Mgr de Villemontée, évêque de Saint-Malo, en pasteur aimé et zélé, uni à un clergé fidèle, surveillait ce loup redoutable qui voulait ravir l'amour de Jésus-Christ pour les hommes. Un de ses prédécesseurs, Mgr Le Gouverneur, avait établi la Confrérie du Saint-Sacrement dans le diocèse ; malgré ce zèle ardent, le jansénisme apparut et fit des ravages. L'éducation solidement chrétienne de Madame de Volvire et le caractère ferme du chef de la famille éloignèrent la pernicieuse doctrine du château et même du comté du Bois de la Roche. Aussi leurs enfants, « instruits des éléments sains de notre Foi religieuse, purent-ils être admis de bonne heure à la première communion » Madame de Volvire et Mlle Hélène, sa belle-sœur, préparèrent elles-mêmes Mlle du Bois de la Roche à sa première communion. L'enfant sut ses prières vocales dès le bas-âge ; elle apprit le catéchisme du diocèse en apprenant à lire ; si bien, qu'à dix ans, elle en savait non seulement la lettre, mais encore pouvait répondre à l'explication du sens des mots. L'Histoire de la Religion, de même que les récits de l'Evangile ou la Vie des Saints, la charmaient en fortifiant son âme. Au commencement du mois de mai, en 1664, elle fut admise à la première communion, après examen, par Dom François Urien, recteur de Néant. Au mois d'octobre qui suivit cette insigne faveur, Mlle du Bois de la Roche quitta le château, témoin de sa première enfance, pour entrer au pensionnat des Dames Ursulines de Ploërmel. Là, elle rencontra les demoiselles des grandes familles du pays qui, plus tard, avec elles seront connues sous le nom de « Dames charitables ». A son entrée chez les Dames Ursulines, en 1665, Mlle du Bois de la Roche reçut une grâce insigne, le sacrement de la Confirmation. Nos seigneurs les Evêques de Saint-Malo avaient, à celte époque, pour maison de campagne le château à Saint-Malo-de-Beignon, avantage qui leur permettait de visiter les paroisses et monastères de leur vaste diocèse et d'y conférer le sacrement de la Confirmation. Plusieurs évêques ont été inhumés dans l'église de cette paroisse. Or, le Bois de la Roche est à cinq lieues environ de St-Malo-de-Beignon, ce qui donnait à la famille de Volvire l'honneur de recevoir chez elle ces princes de l'Eglise. A l'âge de 16 à 17ans, Mlle du Bois de la Roche était bien faite, et d'une très-belle figure ; elle avait beaucoup d'esprit et était fort enjouée. Un jeune seigneur, touché de ses bonnes qualités, la demanda à ses parents en mariage. En vain Monsieur son père et Madame sa mère l'engagèrent à le fiancer, elle n'avait aucune inclination pour ce jeune seigneur. Ses parents connaissant l'inclination de leur fille pour la chasse, arrangèrent une partie de chasse à cheval; ils espéraient que dans ce genre de divertissement qu'elle aimait, il lui naîtrait de l'inclination pour celui qui la recherchait en mariage. Le jour désigné pour cette partie de plaisir étant arrivé, tous les chasseurs invités se trouvèrent, chacun avec son cheval, à l'heure marquée, à l'entrée du bois qu'on nomme le Parc, situé près le château du Bois de la Roche. Les piqueurs sonnent du cor près du cheval de Mlle du Bois de la Roche: il prend le mors aux dents, il avance, il court si vite qu'elle n'en peut descendre. Il la dérobe dans le bois-aux yeux des autres chasseurs; enfin, il se jette dans un précipice qui a environ 60 pieds de profondeur et s'y perd. Les chasseurs ayant perdu de vue Mlle du Bois de la Roche, sont inquiets; ils courent çà et là; enfin après bien des recherches, ils la trouvent suspendue sur le précipice où son cheval vient de .se perdre. Au même instant où il s'était jeté dans le précipice, elle s'était accrochée par un bras aux branches d'un arbre très-élevé, et était demeurée ainsi suspendue. Tous craignirent pour la vie de Mlle du Bois de la Roche. On réussit à la tirer du danger où elle était: la crainte l'avait tellement saisie dans ce danger qu'elle resta toute tremblante et tout effrayée plusieurs heures après qu'elle en eut été délivrée. A peine ses frayeurs furent-elles dissipées, que ce jeune seigneur lui demande derechef une promesse d'union conjugale; il n'en eut pas une réponse plus favorable que les précédentes. Les réflexions que j'ai faites lorsque j'étais suspendue à l'arbre sur le précipice que vous venez de voir, lui dit-elle, m'ont absolument dégoûtée du mariage. Je vous prie de ne plus penser à moi. Mlle du Bois de la Roche avait fait réflexion sur l'incertitude de la durée de la vie, et le danger où elle était de mourir, si on ne venait promptement la secourir. Elle avait pensé à l'état d'un homme qui a cessé de vivre. Dès ce moment, disait-elle, fût-il ce qu'il y a de plus grand dans le monde, sa grandeur disparaît. Il est dépouillé de toute autorité. Il n'a plus de quoi se faire craindre, ni de quoi se faire aimer: il perd toutes ses espérances, » tous ses projets sont détruits, tous ses desseins sont renversés. Il devient un objet, d'horreur, il périt pour tout le monde, et tout le monde périt pour lui: il n'est plus qu'un peu de cette même terre que chacun foule aux pieds. Telle est, disait-elle, le sort de ceux qui ne pensent point à Dieu. Pour ceux qui ne vivent que pour Dieu, ils ne sont jamais plus vivants que lorsqu'ils paraissent cesser de vivre. Ils ne périssent à nos yeux que pour se trouver en Dieu. C'est ainsi que la divine Providence, sage et douce dans ses voies, fit que le moyen qu'on avait pris pour attacher au monde Mlle du Bois de la Roche servit à l'en séparer pour jamais. Malgré le refus que faisait Mlle du Bois de la Roche de fiancer le jeune gentilhomme dont on a parlé, ses parents espéraient la persuader et la faire entrer dans leurs vues. Ils espéraient que les sérieuses réflexions qu'elle avait faites pendant le danger auquel elle avait été exposée, s'effaceraient peu à peu de son esprit, parce qu'elle était fort jeune. L'envie de procurer à leur fille un mariage avantageux ne contribuait pas peu à leur donner cette confiance. Dans cette espérance, ils prièrent le jeune seigneur de rester quelque temps au château du Bois de la Roche. Mais ni le temps ni l'intérêt ne firent à ce mariage, qu'elle ne se marierait pas. Les avantages, les satisfactions qu'on, lui promettait dans ce mariage auraient dû faire quelque impression sur le cœur d'une personne. Le respect, la tendresse qu’elle avait pour ses parents ne devaient pas peu contribuer à la persuader. Bien d'autres que Mlle du Bois de la Roche se seraient rendues; mais quand la grâce s'est rendue maîtresse d'un cœur, elle l'éclaire, elle l'affermit, elle supplée à ce que l'âge et l'expérience,ont coutume de donner. Mlle du Bois de la Roche répondit avec fidélité, dans la suite de sa vie, aux grâces que Dieu lui fit. C'est ce qui la fit parvenir à cette sainteté éminente que l'on verra dans la suite de sa vie. Heureux qui l’imite et qui marche avec fidélité dans les voies que Dieu lui marque. Jusqu'à cette partie de chasse où elle fut en danger de périr, elle avait vécu comme vivent les jeunes personnes du monde. Elle aimait la parure et les divertissements de son âge. Mlle du Bois de la Roche n'était pas aussi modestement couverte que doivent l‘être les femmes chrétiennes. Sa parure était trop riche. Elle avait encore, comme je l'ai dit, une grande passion pour la chasse. Du reste, elle était sans reproche. On sera peut-être porté à excuser la légèreté ou la vanité d'une jeune personne de 16 à 17 ans. Mais elle ne s'est pas pardonné à elle-même: elle a mis au nombre des péchés qu'elle devait expier, son assujettissement aux usages et aux modes du monde qui existaient de son temps. Un jour, interrogée par sa servante pourquoi elle ne portait plus de beaux habits, pourquoi elle n'en changeait pas deux fois le jour, comme autrefois, elle lui fit la réponse suivante: Cela me coûte bien cher aujourd'hui. Cette réponse est conforme à la doctrine qu'enseigne saint Paul, dans sa première épître, Mlle du Bois de la Roche commença donc à l'âge de 16 à 17 ans à mener une vie pénitente qui l'a fait regarder après sa mort, et même pendant sa vie, comme une sainte. Elle s'habilla en soeur de retraite. Elle portait un habit noir et des coiffes carrées. Il y a apparence qu'elle choisit cet habit simple et pauvre pour expier par-là les fautes qu'elle avait faites en portant, dans un âge trop peu éclairé, des habits peu modestes et trop riches. M. de Volvire continuait de faire paraître son mécontentement du refus que sa fille avait fait de fiancer le gentilhomme dont on a parlé. Il était peiné de la voir dégoûtée de tout ce que le monde recherche avec plaisir. Il crut qu'elle avait communiqué ses réflexions à un confesseur qui l'y fortifiait. Il fit son possible pour le connaître. Mlle du Bois de la Roche connaissait les sentiments de son père, et, craignant de faire persécuter son confesseur, choisit la chapelle de Kernéant pour faire ses dévotions. Elle ne pouvait faire un meilleur choix: cette chapelle, un peu éloignée du village du même nom, est située à la sortie du bois du Parc. Elle pouvait s'y rendre sans-être vue de personne. Ces mesures, quoique très sages, devinrent inutiles. Il observa et la fit observer avec tant de soins, qu'il découvrit le rendez-vous. Il soupçonna un jour que Mlle du Bois de la Roche et son confesseur étaient à la chapelle de Kernéant: il ordonna à deux de ses domestiques de l'y accompagner; ils arrivèrent au moment où le prêtre célébrait la sainte messe. A peine y furent-ils entrés, que le prêtre et Mlle du Bois de la Roche devinrent tout tremblants; cette dernière communia à la postcommunion. M. de Volvire sortit de la chapelle et resta à la porte à attendre le prêtre et sa fille. Leurs actions de grâces furent très-longues; ils n'osaient sortir. Il est aisé de juger quels étaient dans ces circonstances les sentiments de Mlle du Bois de la Roche. Elle craignait pour la vie de son confesseur. Elle s'intéressa sans doute pour lui auprès de Dieu. Il fallut enfin se résoudre à sortir de la chapelle; mais sa surprise fut très-grande M. de Volvire fit au prêtre des remercîments pour tous les services qu'il rendait à sa fille. Il lui dit qu'il était touché de la peine qu'il prenait de venir de Guilliers pour l'obliger: il ajouta à ces remercîments une prière qui fit plaisir à Mlle du Bois de la Roche. « Je vous prie, lui « dit-il, devenir faire vos fonctions saintes à la « chapelle de mon château, et de diner avec nous toutes les fois que vous y viendrez. » D'où peut venir un changement si prompt dans les sentiments de M. de Volvire? IL est mécontent du genre de vie de sa fille. Il paraît même qu'il ne se rend à la chapelle de Kernéant avec des armes à feu que pour maltraiter le prêtre qu'il y trouvera, ou tout au moins pour le réprimander fortement. Ne pourrait-on pas l'attribuer aux prières de sa fille? J'en laisse le jugement au lecteur discret et religieux. Il paraît que M. de Volvire laissa dès ce moment à la Providence le soin de disposer de sa fille qu'il voulait engager dans le monde. Comme il la vit portée à une vie retirée et pénitente, et qu'il crut que Dieu l'y appelait, il cessa de s'y opposer. Cet exemple condamne bien des pères et-mères qui, ne connaissant à leurs enfants d'autre vocation que leur volonté, les engagent, contre leur inclination, dans des états qui ne leur conviennent pas ou les empêchent de prendre ceux qui leur conviennent. Le reste de la vie de Mlle du Bois de la Roche n'est qu'un tissu de bonnes œuvres qui se succèdent les unes aux autres. Elle s'applique à la prière, au soin des pauvres et des infirmes. Elle se sépare du monde, elle ne lui donne que ce que la bienséance ne lui permet pas de refuser. Elle ne mange avec ses parents que lorsqu'ils sont seuls à table. M. son père ne désapprouvant point son genre de vie, qu'il ne pouvait souffrir dans les premiers moments, elle fut moins gênée dans ses pratiques de piété. Elle se choisit une chambre près la chapelle du château, Cette chambre n'en était séparée que par un mur dans lequel il y avait une ouverture, de sorte qu'elle pouvait entendre la messe de sa chambre. C'était là qu'elle épanchait son cœur devant le Seigneur, qu'elle l'adorait comme son Créateur et son souverain Maître, qu'elle méditait ses perfections infinies, qu'elle lui témoignait son amour et sa reconnaissance , comme à son bienfaiteur, qu'elle gémissait de n'avoir pas aimé plus vite sa beauté suprême. 0 mon Dieu! Beauté toujours ancienne et toujours nouvelle, c'est bien tard que je vous ai connu, disait-elle avec saint Augustin. C'est bien tard que je vous ai aimé. Toutes les perfections, tous les attraits des créatures les plus belles et les plus accomplies réunis ajoutait-elle, ne sont qu'un faible portrait de vos grandeurs, ou pour mieux dire, ne sont rien devant votre beauté et vos perfections. Le soin des pauvres fut aussi une des occupations que Mlle du Bois de la Roche Elle nourrit les pauvres de la paroisse de Néant. Ceux des paroisses voisines, instruits de l'amour de Mlle du Bois de la Roche pour les malheureux, lui demandent du secours. Elle distribue à tous son revenu et tout ce que son industrie lui procure. Un jour, sa servante l’avertit qu'un pauvre venait de changer son habit pour n'être pas reconnu, et, par cette fraude, recevoir deux aumônes dans le même jour. Elle donna néanmoins une seconde aumône à ce pauvre, et répondit à sa servante que la peine qu'il avait-eue à changer ses haillons méritait une seconde aumône. Elle se disait à elle-même, dans cette occasion: Hélas! combien de fois me présenté-je devant Dieu pour lui demander mes besoins. Si, après que je me suis présentée une fois, il me rejetait toutes les autres, où en serais-je? Si l'on voulait se régler ainsi sur l'exemple du Père céleste auquel Jésus-Christ recourait si souvent, il y aurait plus d'humanité parmi les hommes Il ne faut pas que le lecteur ignore que M. de Volvire voulut avoir part aux bonnes oeuvres de sa fille. « Ma fille, lui dit-il un « jour, prenez chez moi ce qui est nécessaire «pour le soulagement des malheureux. Je « veux avoir part à vos bonnes oeuvres.» Elle ne se contentait pas d'assister les pauvres qui s'adressaient à elle, sa charité s'étendait encore sur plusieurs familles honnêtes réduites à mendier, mais-qui n'osaient le faire. Pour leur épargner la confusion, elle se chargeait seule de cette bonne œuvre ou la partageait avec sa servante, dont elle connaissait la vertu. Elle ne donna pas seulement du pain à ceux qui avaient faim; mais elle couvrit les nus. Elle avait à gage un tailleur nommé Joseph Chaussée, qui travaillait habituellement pour les pauvres. Je puis dire de Mlle du Bois de la Roche ce que de saint homme Job dit lui-même (Job, Ch. 25) : qu'elle ne refusa jamais aux pauvres ce qu'ils désiraient,-qu'elle ne fit point attendre en vain les yeux de la veuve, qu'elle ne mangea pas seule son pain, qu'elle le partagea avec l'orphelin, qu'elle ne négligea point de secourir celui qui n'ayant pas d'habit mourait de froid, ni le pauvre qui était sans vêtements. Les infirmes ont reçu d'elle tous les secours qu'ils pouvaient en attendre. Elle les traitait elle-même. Elle avait appris à les traiter à l'hôpital de Rennes. Elle y demeura quelque temps après être sortie de la maison de Retraite de la même ville où elle avait aussi passé quelque temps. Elle donnait les bouillions, le linge nécessaire pour les changer. Il eut dans la paroisse de Néant une maladie très-dangereuse. Plusieurs malades furent abandonnés. Les personnes saines n’osaient les visiter. Mlle du Bois de la Roche l'apprend; elle vole à leur secours. Elle en prend un soin particulier. Elle les change elle-même de linge, et leur rend les services les plus bas. Si ses parents eussent su tout ce qu'elle faisait, le danger de perdre la vie où elle s'exposait, ils en eussent été très-mécontents: c'est pour leur en dérober la connaissance qu'elle ne visitait que la nuit la plupart de ces malheureux. L'ancien hôpital de la ville de Ploërmel était situé au bas de la rue qu'on nomme encore aujourd'hui la rue de l'Hôpital. L'air que les malades y respiraient y était très-mauvais. Il retardait les guérisons et souvent augmentait le mal. Mlle du Bois de la Roche, touchée de ces maux, mit tout en oeuvre pour pouvoir en faire bâtir un autre dans un air plus sain. Elle eut la satisfaction de voir ses desseins accomplis. Elle contribua à cette bonne oeuvre. Elle seule donna la majeure partie de l'enclos, et contribua, autant qu'elle put, aux dépenses qu'on fit pour bâtir la maison. A peine fut-elle bâtie et meublée, qu'elle donna une grande partie de son temps au soin des pauvres et des malades. On ne tarda pas à payer d'ingratitude tant de services. On lui fît-une mauvaise chicane. Pour un plus grand bien, elle interrompit pendant quelque temps les services qu'elle rendait aux malades et aux pauvres de ce lieu. Que de services elle a rendus à l'humanité Il n'en faut pas davantage sans doute pour justifier que c'était avec beaucoup de raison que les pauvres l'appelaient leur mère, et pour donner droit de dire d'elle qu'elle remplissait de consolation le cœur de la veuve, et que celui qui était près de périr la comblait de bénédictions (Job, ch. 29, t. 13). Elle le méritait, non-seulement par l'étendue, par la persévérance et par la promptitude de sa charité, mais encore par les sentiments de tendresse et d'humilité dont elle l'accompagnait. On veut placer à Paris, au collège de Louis-le-Grand, deux de ses neveux. Ses parents la destinent pour les y conduire et les présenter. Elle y sent une grande répugnance, malgré cette répugnance, elle y consent, mais à condition qu'elle porterait son habit de sœur de Retraite qu'ils voulaient lui faire changer. Pendant le court séjour qu'elle fit dans la France, on parla d'elle à Louis XIV. Ce grand Roi, qui faisait tant d'estime de la vertu, et qui honorait ceux qui la pratiquaient, voulut converser avec elle. Mlle du Bois de la Roche l'entretint avec esprit. Ce Roi, charmé de son esprit et de sa vertu, donna une somme d'argent pour l'aider à continuer ses bonnes oeuvres: la piété n'ôte rien à l'esprit. Mlle du Bois de la Roche passe une grande partie de son temps à visiter et soigner les malades, et à soulager les pauvres: vous diriez qu'elle n'est plus propre pour le monde; cependant elle sait entretenir avec esprit le plus grand Roi de l'Europe, et l'intéresse adroitement au soulagement des malheureux de son pays. Mlle du Bois de la Roche a été très-mortifiée. La vertu de mortification a deux parties, L’une regarde les passions, l'autre les sens extérieurs; elle les a cultivées toutes les deux avec une égale affection. Elle détestait naturellement les enfants; pour se vaincre là-dessus, elle prit chez elle une petite fille malpropre et dégoûtante; elle l'habillait elle-même et lui rendait tous les services dont les enfants ont besoin. Elle fit plus, elle défendit à sa servante de lui rendre aucun service, pour ne laisser échapper aucune occasion de se mortifier. Nous avons un autre témoignage de sa parfaite mortification, dans la manière avec laquelle elle conduisit sa langue. Il faut être parfait, dit saint Jacques, pour ne pas bouche quand on lui dit des injures? On paie d'ingratitude les services de Mlle du Bois de la Roche; on lui fait une mauvaise chicane; elle ne répond rien, elle interrompt les services qu'elle rend aux pauvres du lieu où on la persécute, pour les continuer lorsque l'orage sera dissipé. Si elle s'étudie avec tant de soin à se rendre maîtresse de ses mouvements intérieurs, elle n'apporte pas moins d'attention à mortifier ses sens extérieurs. Lorsqu'elle se trouvait dans les hôpitaux ou chez les pauvres infirmes, elle souffrait avec satisfaction les mauvaises odeurs qu'elle y respirait. Elle donnait ordinairement aux pauvres ce qu'on lui servait pour son déjeuner. Les jours de Fêtes et les Dimanches, lorsqu'elle ne revenait pas après la grand'messe dîner au château, elle se contentait d'un morceau de pain avec un peu de beurre ou de viande qu'elle mangeait dans une pauvre maison du bourg de Néant, ou au coin d'un buisson. Lorsqu'on lui servait à dîner dans sa chambre, elle donnait les meilleurs mets au tailleur dont j'ai parlé. Elle couchait sur la simple paille. Voici comment on l'a appris : Un jour elle se trouva si mal qu'elle ne put se lever de son lit; on la trouva couchée sur la paille. Sans cela on l'eut toujours ignoré. Il y a lieu de croire que les desseins que Dieu avait sur sa servante étant heureusement accomplis, il voulut mettre le comble à toutes les grâces qu'il lui avait faites, en l'appelant à une meilleure vie.- Elle reçut le saint Viatique qu'elle désirait ardemment. Qui pourrait trouver des paroles assez expressives pour faire comprendre les ardeurs de son âme dans cette sainte action? On lui donna l'Extrême-Onction; elle reçut ce sacrement avec de grands sentiments de religion. Elle eut jusqu'au dernier moment une grande attention aux besoins des pauvres. Elle fit, le 40 février 1694, un testament par lequel elle légua cinquante livres de rente à l'hôpital.de Saint-Brieuc et deux cents livres de rente à celui de Ploërmel. Elle mourut le 22 février 1694, dans une odeur universelle de sainteté. Cette mort fit, dans l'esprit de tout le monde, des impressions d'admiration et de piété qui suivent ordinairement la mort des justes dont la mémoire est en bénédiction. On entendit dans la paroisse de Néant et dans les paroisses voisines les plaintes et les cris des pauvres, sans qu'on pût les consoler, parce qu'ils venaient de perdre leur mère. Ils se rendirent au château du Bois de la Roche où elle venait d'expirer, pour lui rendre les derniers devoirs. Ils portèrent le corps de leur bienfaitrice à l'église de Néant. Ils furent accompagnés d'un concours infini de personnes de tous les états et de toutes les conditions. Il arriva dans ce transport une chose qui semble tenir du prodige. Les pauvres qui portaient le corps de notre défunte le posèrent à terre un instant; il se forma dans cet endroit une petite fontaine qu'on nomme aujourd'hui la fontaine de la Sainte de Néant (c'est ainsi qu'on appelle Mlle du Bois de la Roche depuis sa mort, ou autrement sainte Anne, parce qu'elle fut nommée Anne à son baptême). Cette fontaine est entourée depuis peu d'un maçonnage d'environ trois pieds de hauteur, sur lequel est une petite croix. Le corps de Mlle du Bois de la Roche fut inhumé le 23 février dans l'église de Néant, près les fonts baptismaux, comme elle l'avait demandé dans son testament. Son tombeau a été, après sa mort, entouré d'une grille de fer haute de trois pieds et demi; au-dedans de cette grille on a placé un dais d'environ quatre pieds de hauteur; il est ordinairement couvert d'une étoffe précieuse de couleur blanche. C'est ainsi qu'on commença à l'honorer après sa mort. Cet honneur est sans doute approuvé des Évêques de Saint-Malo; cette grille, ce dais élevé sur son tombeau en sont une preuve; on trouve aussi à la marge du registre de son baptême ces mots: Morte en odeur de sainteté. On a vu à son tombeau 200 personnes ensemble, qui, après l'y avoir priée, allaient à la fontaine dont j'ai parlé; ce concours dura huit jours consécutifs. En 1840, au rapport de la tradition, la peur d'un vol sacrilège fit qu'il fut procédé secrètement à l'exhumation du corps de Mademoiselle du Bois de la Roche. Dans le caveau de son tombeau, ouvert après 154 ans de sépulture, se trouvèrent des ossements, un linge et de la poussière de son corps recueillis par les prêtres de la paroisse de Néant, ces précieux restes furent déposés dans une cassette et confiés au coffre-fort de la sacristie de l'église. En ce temps-là, le tombeau de la servante de Dieu toujours entouré d'une grille, demeura surmonté d'un pavillon carré, formant un dais orné d'étoffe précieuse. Vingt-six ans plus tard, vers 1866, Mgr Bécel, apprennent, en effet, qu'à cette époque les puissantes maisons du Fresne et du Bois de la Roche étaient divisées d'opinion à propos de la création d'une nouvelle paroisse au Bois de la Roche; que chacune prétendait avoir des droits sur le corps de la servante de Dieu. Pour l'amour de la paix, M. Chantrel, recteur de Néant, commanda après autorisation de qui de droit, l'exhumation des restes précieux de Mademoiselle du Bois de la Roche. L’évêque de Vannes, authentiqua ces restes vénérés. La cassette les renfermant, munie du sceau épiscopal, fut déposée, sans cérémonie aucune, dans le caveau primitif d'où ils avaient été retirés en 1840. La générosité des fidèles a permis, en 1881, d'ériger un Tombeau de marbre blanc avec une grille superbe sur les précieux restes du corps de la servante de Dieu. Le 24 octobre de la même année, Mgr Bécel, évêque de Vannes, présent à la mission du Jubilé, a bénit solennellement ce tombeau, cérémonie touchante où se pressait un grand nombre de fidèles réunis pour les exercices de la mission. Pendant la réparation du chemin de Néant au Bois de la Roche, en 1872, la fontaine de la « Sainte », source dite miraculeuse, fut embellie. La maçonnerie de moëllon fit place à de superbes pierres de granit que surmonte une croix de même. Cette fontaine aux eaux salutaires demeure située, comme avant sa restauration, au milieu du grand chemin. Faveurs insignes par l'intercession de Mlle du Bois de la Roche Plusieurs pèlerins ont reçu du ciel des faveurs insignes par l'intercession de Mlle du Bois de la Roche; Melle ! Anne-Françoise de Kerpédron, de la ville de Josselin, eut au genou un dépôt qui descendit dans la jambe. Un habile chirurgien, nommé Cabanac, lui fit à cette jambe une opération, il lui ôta le sac qui contenait l'abcès; mais il ne put lui rendre l'usage de la jambe, elle ne marcha qu'à l'aide de deux béquilles pendant dix-sept ans, elle vint faire une neuvaine au tombeau-de Mlle du Bois de la Roche; lorsqu'elle prit, le neuvième jour, ses béquilles pour ¡s'en retourner, elle sentit qu'elle n'en avait plus besoin pour marcher, et s'en alla sans bâton chez son parent, où elle demeurait depuis quelque temps. Elle laissa ses béquilles au tombeau de Mlle du Bois de la Roche, pour témoignage de sa parfaite guérison. Le lendemain on chanta le Te Deum et une grand'messe pour remercier Dieu de ce bienfait. Mlle de Kerpédron laissa au tombeau par reconnaissance, deux bagues d'or et deux boucles d'argent. Mlle Kerpédron obtint de Dieu une autre grâce, par l'entremise de Mlle du Bois de la Roche. Aussitôt qu'elle fut guérie miraculeusement, elle fit voeu de se faire religieuse; mais elle n'avait point d'argent pour payer sa dot; elle crut que celle qui venait de lui rendre l'usage de sa jambe pourrait lui procurer sa dot. Elle pria sa bienfaitrice de l'aider à exécuter son pieux dessein. Elle fait sa prière le soir; le lendemain, une personne charitable vint lui faire présent de la somme d'argent que les Religieuses du Mont-Cassin de Josselin lui demandaient pour sa dot. Elle fit attacher une Religieuse postiche au dais qui est sur le tombeau de-Mlle du Bois de la Roche, pour faire connaître cette seconde grâce qu'elle venait de recevoir par son intercession, et pour lui témoigner sa reconnaissance. Mme la Supérieure des Religieuses de Mont-Cassin, à Josselin, a assuré avoir été guérie de la fièvre quarte au tombeau de Mlle du Bois de la Roche. Cécile Tramaillet, de la paroisse de Néant, avait eu trois couches très-difficiles; elle croyait que la quatrième lui coûterait la vie; lorsque le terme en fut arrivé, elle ressentit de très-grandes douleurs: elle crut être sur le point de mourir, et invoqua mademoiselle du Bois de la Roche: à peine sa prière fut-elle finie, qu'elle accoucha sans douleur. Joseph Jarnigou, âgé de deux ans, était à l'agonie depuis un jour. Depuis son agonie, il avait perdu l'usage de la parole qui lui fut rendue dans le même temps qu'une de ses tantes priait Mlle du Bois de la Roche de lui rendre la santé. Ses parents furent surpris d'entendre leur enfant parler au moment qu'il devait expirer. Leur surprise cessa lorsque la tante de l'enfant désigna le moment où elle avait prié Mlle du Bois de la Roche pour lui. Ils sont très persuadés qu'elle a rendu la vie à leur enfant. En 1823, Marie Brien, domestique chez M. Vrien, vicaire de Ménéac, ayant été environ l'espace de 14 ans sans pouvoir marcher qu'avec une peine extrême et les jambes croisées, fit un voyage au tombeau de la Sainte et recouvra le parfait usage de ses jambes. Tout le voisinage est témoin de cette guérison. Fait rapporté par des témoins oculaires dignes de foi. 1832. Une petite fille de Josselin, âgée de 9 à 10 ans, n'ayant jamais marché qu'à l'aide de béquilles, fut amenée un dimanche à la Sainte et fut parfaitement guérie sur les lieux mêmes, de sorte qu'elle laissa ses béquilles qui se trouvent encore à la sacristie. Ce miracle a été vu par plus de quatre cents personnes qui se trouvaient à la grand’messe. Mlle Angélique Dabois étant fort malade et dans un état si inquiétant pour les personnes qui étaient près d'elle, qu'elles la crurent au moment d'expirer, quand une de ses tantes l'engage à se recommander aux prières de Mlle de Volvire aussitôt la malade, qui avait eu antérieurement beaucoup de confiance en cette bonne demoiselle, réunit le peu de forces qui lui restait pour se recommander à elle; un instant après elle dit que Mlle de Volvire lui avait annoncé qu'elle aurait trois crises, mais qu'elle n'en mourrait pas. Elle eut effectivement les trois crises quelle avait annoncées, et le médecin qui, arriva à la fin de la dernière, la trouva dans un état si désespéré qu'il dit que dans 24 heures elle serait en terre. Cependant, depuis cet instant elle fut toujours de mieux en mieux et le même médecin qui revint le lendemain pour la voir, quoiqu'en tremblant, comme il l'a dit depuis, fut si étonné du changement qu'il trouva en elle, qu'il dit alors qu'il répondait de sa vie. La malade s'est effectivement parfaitement rétablie. Moi, François Garel grand-père de la petite Hervigot, depuis trois ans ulcérée en plusieurs endroits du corps et pouvant à peine marcher, son père et moi nous l'avons conduite au tombeau de Mlle de Volvire; étant entrés dans l'église devant le Saint-Sacrement pour demander du secours à Dieu en sa faveur, nous lui avons donné un cierge et l'avons conduite au tombeau, en récitant les litanies de la Sainte Vierge. Delà, nous avons été à la fontaine; et, ayant découvert ses plaies pour les lui laver, nous avons été fort étonnés de n'y trouver que les cicatrices; nous sommes revenus à l'église rendre grâce à Dieu d'une telle faveur. Nous sommes ensuite retournés chez nous, où la petite, parfaitement guérie, s'est mise à jouer avec les autres enfants, Signé= Gabriel Hervigot; François Gorel; Soeur Anthime, religieuse à l'hôpital de Malestroit. Nous n’avons cités quelques-unes de ces faveurs prises çà et là parmi les soixante-dix-huit dont le récit circonstancié est rapporté dans l'édition première de sa biographie au 18e siècle ou au Registre paroissial de Néant. Sources= J-M TURPIN+ANNE-TOUSSAINTE DE VOLVIRE DE RUFFEC ABBE PIEDERRIERE =VIE D’ANNE-TOUSSAINTE DE VOLVIRE, DITE LA SAINTE DE NEANT