Seigneurie ou maison noble
Saint-Jean (Hôpital)
COURNON
56200
Morbihan
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- Autorisation Papale de Construction d’un Hospice. L’examen de l’arbre généalogique des Montfort et Montauban montre que Raoul II de Montfort eut deux fils : Guillaume et Olivier. Ce dernier eut comme descendance : Philippe de Montauban, Alain de Montauban, Olivier II de Montauban et enfin Olivier III de Montauban. Pour sa part, Guillaume II de Montfort, eut pour descendance Eudon de Montfort et Raoul V de Montfort. Ce dernier épousa Julienne de Tournemine, celle-ci était donc la grand-tante de Olivier III de Montauban quand celui-ci l’épousa secrètement vers 1300/1301. Peu à peu cette union devint plus ou moins publique et fut avalisée par une sentence du pape Jean XXII ; elle fut lue dans les églises de Montfort, Montauban et Guer mais pas à La Gacilly, aucune chapelle n’y existait alors. Le prédécesseur de Jean XXII, Clément V avait installé la papauté à Avignon en 1305. C’est pourquoi, lorsque la dispense d’empêchement de consanguinité aux 3° et 4° degrés fut demandée en 1320 au Saint-Siège, la réponse papale porte la mention « Datum Avenione » suivie de la date. Cette même mention figure aussi sur l’autorisation papale accordée à Olivier III de Montauban et Julienne de Tournemine de construire un pont, un hôpital et une chapelle au Bout-du-Pont à La Gacilly. Cette bulle du 3 juillet 1317 fut d’ailleurs accordée par le pape sans que celui-ci sache que l’union des demandeurs était alors nulle. Il est permis de penser qu’Olivier III, sachant avoir besoin de l’aval du pape pour officialiser son mariage avec Julienne de Tournemine, ait commencé par faire un bel acte de charité (ce dont La Gacilly ne fut pas fâchée) pour se faire connaître du côté d’Avignon et obtenir ainsi plus facilement la dispense d’empêchement de consanguinité. Le Saint-Siège alla même au-delà des espérances d’Olivier III puisqu’il octroya, dans une autre bulle datée du 6 juillet 1317, trente jours d’indulgence à ceux qui visiteront la chapelle projetée lors des fêtes de l’Exaltation de la Sainte Croix (14 septembre), du Vendredi Saint et de l’Invention de la Sainte Croix (3 mai) . Autorisation papale de Construction de l'Hospice. Il est à remarquer que ces trois jours honorent la Croix du Sauveur. On peut penser que la chapelle possédait une relique insigne de la Vraie Croix. La chose n’a rien d’étonnant. Ces Montauban, seigneurs de La Gacilly, avaient pris part aux croisades et ils avaient vaillamment guerroyé en Palestine pour la cause du Christ. Ayant gagné dans cette lutte contre l’infidèle plus d’honneur que d’argent, ils étaient revenus au pays rapportant avec eux leur foi et les reliques des saints des premiers siècles conservées en Orient. Après leur retour, ils déposaient ces précieux trophées dans les chapelles seigneuriales ou bâtissaient de nouveaux temples pour leur servir de reliquaires. Ce sont ces sentiments pieux des croisés qui nous expliquent qu’à part Saint Jugon et Saint Vincent-Ferrier (qui devait venir un peu plus tard) tous les saints honorés à La Gacilly au temps des Montauban sont des saints d’Orient : Saint Nicolas, Saint Cyr, Sainte Julitte, Saint Barthélémy. Il faut faire remarquer enfin que mis à part la citation dans le Cartulaire de Redon de « l’hospitalis de la Gatcyly » - ces bulles sont les deux premiers documents écrits connus qui fassent mention de « la villa de Lagacille ». Histoire de l’Hospice. Il faut commencer par préciser que le personnel de l’hospice ne comprend pas de religieux ou de religieuses mis à part le chapelain portant le titre de prieur. Il est dirigé par des gardiens ou hospitaliers qui étaient de pieux laïcs menant une vie très stricte équivalant à une vie religieuse. Les archives donnent un grand nombre de noms de mendiants de La Gacilly et des environs décédés à l’Hôpital Saint-Jean ainsi que des naissances d’enfants étrangers venus parfois de très loin surtout au XVII° siècle. Ceci montre qu’à cette époque, on voyageait beaucoup malgré les difficultés de communication, le coût des déplacements et le peu de sûreté des routes ; ceci prouve également que les foires de La Gacilly attiraient au pays des marchands très éloignés qui y séjournaient assez longtemps. Ainsi, en 1639, Gabrielle Merlet, fille de Martin et de Louise Després, naquit à l’Hôpital de La Gacilly. Le parrain de l’enfant fut Julien Bourrée, originaire de Saint-Malo. Et aussi, le 19 novembre 1665, toujours à l’Hôpital de La Gacilly, naissance de Anne Forthomme, fille de Louis, originaire de la paroisse du Temple, évêché de Chartres en Beauce, de passage à La Gacilly. Cet hôpital devait subsister plus de quatre cents ans pour le plus grand bien des vieillards, des infirmes et des malades de La Gacilly et des environs, mais aussi des mendiants, des voyageurs et des pèlerins qui pouvaient y trouver un asile momentané. Jusque vers la fin du XVII° siècle, cet établissement fut entièrement à la charge des seigneurs de La Gacilly qui mirent un point d’honneur à remplir les conditions acceptées par le fondateur et d’assurer sur leurs revenus ce qui était nécessaire à la subsistance des chapelains, des gardiens et des malades. Au cours des temps, ils augmentèrent la propriété de l’établissement qui ne comprenait d’abord que la maison, la chapelle et un petit cimetière. Ils donnèrent entre autres un grand jardin sur l’Aff, une pièce de labour, partie en pré au joignant du dit jardin, le tout loué treize livres à Jean Brien et, un peu plus tard, une grande prairie sur la rive droite, le pré Saint-Cyr. Au fil des ans, cet établissement et son chapelain portèrent différents noms. D’abord Hospital et Hospice, puis Aumônerie et même Prieuré. Dans un acte de 1401, il est fait mention du « prioul » (prieur) de l’Hospital. Dans un autre acte de 1465, l’établissement est dénommé « Aumônerie de Saint-Jean ». En 1514, le compte du fermier général de la seigneurie parle de l’Hôpital mais aussi de l’aumônier un nommé André Barbot. En 1516, c’est toujours l’Hôpital. De 1604 à 1607, Guillaume Couerault était titulaire de l’aumônerie Saint-Jean et devait devenir un peu plus tard curé de La Gacilly. En 1628, F.G. Simon, chanoine de Vannes, était prieur de Saint-Jean de La Gacilly. Il signe à ce titre l’acte de pose de la première pierre de la chapelle Notre-Dame ajoutée à l’église Saint-Nicolas. En 1670, la gardienne de l’Hôpital se nommait Gabrielle Tranchant ; elle avait épousé Pierre Rouxel de la trève le 29 juin 1649. Au début du XVII° siècle, l’hospice, la chapelle, le clos et le pré furent annexés à l’ordre hospitalier de Saint-Lazare. Il est d’ailleurs bizarre d’entendre parler de cet ordre religieux à la fin du XVI° siècle étant donné qu’il fut supprimé en 1489. Il aurait été normal que cet hôpital soit plutôt rattaché, à cette date, à l’ordre de Saint-Jean et donc à la commanderie de Carentoir, mais aucun texte connu n’en fait état. C’est donc au moment où l’institution montrait au mieux son utilité qu’elle va subir une transformation qui la conduira sur la voie de la décadence. A cette époque, la seigneurie de La Gacilly venait d’être démembrée entre les familles de la Bédoyère, de la Bourdonnaye, Jean du Houx des Bouëxières et François de Montigny, seigneur de Beauregard, président à mortier du Parlement de Bretagne. Ces divers propriétaires, n’habitant pas le pays, se désintéressent plus ou moins de l’hôpital et ses ressources vont en diminuant avec la dépréciation de l’argent. Déjà en 1676, l’hôpital avait peine à vivre de ses revenus, les ressources laissées par ses anciens fondateurs. C’est pourquoi, par lettres patentes du 30 décembre 1696, rendues sur arrêt du conseil privé du 25 mai précédent, les biens de l’hospice furent annexés à l’hôpital Saint-Nicolas de Vannes avec jouissance à partir du 1° juillet 1695. Cet établissement en prit possession le 29 mai 1697 et fit accord avec un prêtre, Guy Morin des Fougerêts qui s’engagea, dit-on, moyennant une somme annuelle de 20 livres versées par l’hôpital Saint-Nicolas de Vannes à célébrer une messe chaque semaine dans la chapelle de l’aumônerie dont il devint le titulaire. Cependant un aveu de 1727 s’exprime ainsi en parlant des droits du seigneur de La Gacilly « droit de patronage et de supériorité dans l’église Saint-Jean de la ville de La Gacilly ». D’après cela, il faut croire que ledit seigneur n’avait renoncé à aucun de ses droits sur l’aumônerie. Au cours du XVIII° siècle, l’hôpital Saint-Jean connut une rapide déchéance ayant des ressources insuffisantes. La chapelle et les bâtiments menaçant ruine, l’établissement, la chapelle et le clos Saint-Jean furent vendus, le 18 juin 1785, par noble homme Jacques Hyacinthe de Lespinay, administrateur et économe de l’hôpital Saint-Nicolas de Vannes à maître Joseph Marie Grinsart, sieur de Lasalle, sénéchal du comté de Rieux au siège de Peillac et procureur fiscal du marquisat de Sourdéac demeurant alors en la ville de La Gacilly à la charge de faire abattre et démolir immédiatement les murs croulants du dit hôpital et de rebâtir en leur place, sans être tenu toutefois de le faire dans les mêmes proportions, un rez-de-chaussée seulement avec grenier et salorge et de payer en outre à l’hôpital Saint-Nicolas de Vannes la somme de 36 livres de rente foncière annuelle, perpétuelle et infranchissable. Par la suite, en 1789, l’établissement fut converti en magasins et dut appartenir aux Desbois ; il devint, sans doute, la tannerie exploitée pendant les premières années de la Révolution. En 1841, il fut détruit mais sur ses fondements, c’est à dire à la même place et avec la même direction Est-Ouest, fut élevé une autre maison, d’ailleurs nommée l’Hôpital. D’après l’abbé Chérel, les archives de l’hôpital Saint-Jean furent transportées d’abord à Vannes puis à Paris aux archives nationales. c- Les Revenus de l’Hospice. Les revenus de l’hospice furent fluctuants mais toujours conséquents. Ainsi un minu de 1401 relatant les revenus et charges de la seigneurie de La Gacilly déclare « Sur ce est deu par chacun an au prioul de l’ospital de la Gazcilli par fondaesson ancienne, 9 livres et 23 mines de seigle de rente ». En 1465, « sur les moulins à blé, à draps et pescheries de La Gacilly, les moulins de la Bouère, de Duré et le moulin à vent de Mauvoisin sur lesquels on lève 9 mines de seigle pour l’aumônerie de Sainct Jean et Sainct Antoine de La Gacilly. » Pourquoi Saint-Antoine ? En 1514, l’aumônier reçoit 9 livres, 10 sols et 5 deniers de rente avec les deux tiers de la dîme de la tenue de la Vieille Forêt en Saint-Martin-sur-Oust, une dîme des Fougerêts et du village de la Rougerie. Toujours en 1514, la seigneurie accorde 9 livres pour le pain fourni à l’Hôpital. En 1516, une part importante des bénéfices ecclésiastiques des paroisses environnantes était octroyée à l’Hôpital. Ainsi la paroisse de Carentoir versait 18 livres, celle de Ruffiac, 14 livres et celle de Sixt-sur-Aff, 2 livres. Ce qui semble démontrer que l’Hôpital de La Gacilly était le seul existant au moins pour ces trois paroisses et devait recueillir les vieillards et les indigents de tous les environs. D’autres dotations venaient en supplément, si bien que le bénéfice ecclésiastique de cette aumônerie se présentait très avantageusement au début du XVI° siècle.