Préclos (Le)
TRÉAL
56140
Morbihan
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Il est d'abord la propriété de la famille Goureden (ou Gouriden) : Jehan Goureden de 1427 à 1464, puis Renaud Goureden en 1481 et Guillaume Goureden en 1536 ; puis il passe à la famille de La Ruée. Il possédait autrefois une chapelle privée, disparue aujourd'hui La fuite du roi Louis XVI et son arrestation à Varennes le 22 juin 1791 fut connue très rapidement en Bretagne. Elle provoqua une émotion considérable surtout parmi la noblesse. Mais déjà, certains de ses membres se considéraient en état de légitime défense. Ce fut le cas pour le comte de la Ruée dans son château du Pré-Clos en Tréal. Déjà de nombreuses actions contre la noblesse avaient eu lieu. Châteaux pillés, incendiés, papiers de famille brûlés, destructions des chartiers contenant les tîtres de propriété des nobles et les relevés des redevances dues par leurs fermiers et métayers. Les paysans étaient poussés à ces actions par des bandes d'extrémistes toujours prêts à semer la discorde. Dans les environs de Tréal, des exactions furent commises dans plusieurs châteaux. Le château de la Ville-Quéno en Quelneuc échappa de justesse à une tentative d'incendie. D'autres eurent moins de chance. Les habitants de La Chapelle, vers Ploêrmel, abattirent les fossés du château de Brilhac. Les républicains d'Augan, de Guer, de Réminiac forcèrent, Vanne au poing, Messieurs de Cintré, de la Voltais, du Bot de la Grée, de Langan, Mademoiselle du Guiny à renoncer à leurs droits ancestraux : «... Je déclare renoncer à mes droits, fiefs, dîmes, rôles, lods, afféagement, ventes, rachats et droits dont j'ai fait remise pour le passé et l'avenir aux habitants de la paroisse...». Tout ceci bien évidemment extorqué plus ou moins sous la menace. Il en fut de même pour le château de l'Evêque à Saint Malo de Beignon, où les titres seigneuriaux furent livrés aux flammes. Le château de Villeblanche fut incendié dans la nuit du 22 au 23 février 1791. Quant au château du Bas-Sourdéac, il fut le théâtre d'un feu de joie bien arrosé : «Tous ces papiers brûlèrent devant le château durant 6 heures, pendant ce temps le cidre ne cessa de couler à la santé des ci-devant Rieux.» Le roi était revenu dans la capitale, mais restait l'otage de la révolution. A Tréal, ce drame déclencha, ce que les historiens ont appelé : «l'affaire du Pré-Clos». Devant la dégradation de la situation le comte Joseph François Louis de la Ruée résolut de prendre certaines dispositions pour faire face au danger qui se profilait à l'horizon. Il était âgé de cinquante-quatre ans. Ancien officié de cavalerie, il avait eu l'honneur de présider, par intérim, les états de Bretagne en 1788. Il s'imposait à tous par son âge, son autorité, et son prestige de commissaire aux Etats de Bretagne. Il faisait figure de chef de famille. Se méfiant de la bourgeoisie «avocassière et pateline», il ne tarda pas à regrouper, chez lui au Pré-Clos, ses familiers, ses fermiers, quelques serviteurs, et à rassembler des armes et des munitions. Certains jours, il règne au Pré-Clos une intense activité, des allers et retours incessants. Les grandes avenues qui mènent au château sont noires de monde, relate un témoin de l'époque, non sans quelque exagération. La rumeur transforme cette animation inhabituelle en un soi-disant complot, en une conspiration ourdie contre la révolution. Pourtant l'idée d'une insurrection à main armée était si loin, qu'un moment fut agité la question de demander des renforts à la municipalité de Malestroit pour se mettre à l'abri des pillards. Déjà la délation s'en était mêlée. Dugué, le futur prêtre constitutionnel de Pluherlin, dès le mois de septembre 1790 avait dénoncé cette agitation au district. Les commissaires demandent des éclaircissements au curé et maire de Tréal, Michel Robin. Il se passera malgré tout plusieurs mois avant que l'ordre d'intervention ne soit donné. Cela fut décidé le 28 juin 1791. Le lendemain, 29 juin le château du Pré-Clos fut investi par les soldats du régiment de cavalerie de «Walsh» commandé par O'Briend, et appuyés par des membres de la Garde Nationale de Malestroit. Furent saisis 25 fusils, 25 pistolets, 5 sabres, 1 couteau de chasse, 2 fourreaux de pistolets, 15 poudrières, 1 sac à plombs, 2 sacs de balles, 6 couteaux et 1 paquet de poudre. Bien peu de choses en réalité pour une conspiration. Par contre, 37 hommes furent arrêtés. Le comte de la Ruée et treize personnes de sa famille et alliés, trois autres nobles, huit de leurs domestiques qui les accompagnaient, deux paysans, cinq journaliers, un menuisier, un domestique de la métairie de la Touche-Eon, un prêtre parent des de la Ruée, et un commissionnaire du Pré-Clos, Damase Eutrop Daniel, marin invalide, que nous retrouverons bientôt, une fois libéré, dans une autre affaire. Ils vont être emmenés, d'abord à Malestroit, où ils vont passer la nuit, et ensuite leur long calvaire va les conduire de cette cité à Vannes et ensuite à Port Louis, dans des conditions très éprouvantes. Arrivés presque à destination, la force armée eût bien du mal à les protéger d'un lynchage promis par la populace Lorientaise surexitée, postée sur leur passage. Les femmes n'ont pas été arrêtées. Cependant, elles tiennent à partager le sort de leurs pères, frères, époux et vont les accompagner dans leur dur périple jusqu'à la citadelle de Port Louis. Leur pénible détention va durer jusqu'à la fin du mois de septembre 1791. Ils seront libérés (à contrecœur) par l'effet de la loi d'amnistie, promulguée le 15 septembre 1791. Elle portait sur tous les faits politiques et militaires. Louis XVI était encore roi de France. Nous ne sommes pas encore arrivés aux heures sombres de la chouannerie.