Seigneurie ou maison noble
Launay-Couëdor
GUER
56380
Morbihan
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COUËDOR (1). Après Guer cette seigneurie était assurément la plus importante et même nous verrons, dans la suite, qu'elle en était devenue le centre de la châtellenie de Guer. 1° Emplacement et description. — Le château de Couédor a-t-il toujours été à l'endroit où nous le voyons actuellement ?... Le dictionnaire du Morbihan marque : Couédor, c'est évidemment la bonne manière. La famille qui a porté le nom de ce manoir s'appelait : de Couédor, et non du Couédor, Oui, sans aucun doute, mais cependant plusieurs ont cru le contraire. C'est qu'en effet il existe, près du village du Busson, des ruines appelées le « Haut-Couédor » ; un moment nous avons cru nous-mêmes que là se trouvait le vrai château, mais il n'en est rien. En étudiant sérieusement la question nous reconnaissons qu'il ne pouvait y avoir deux Couédor. S'il y en avait eu deux, les Réformations de la paroisse de Guer en parleraient ; de plus, les commissaires n'eussent pas manqué de les signaler, comme ils l'ont fait pour d'autres manoirs portant le même nom. Enfin, si on considère l'étymologie de Couédor, on voit qu'il est impossible, tout au moins très difficile, que le Haut Couédor, qui est assez loin de la rivière et sur une butte, puisse signifier « Bois surl'eau », Coë.t-deur. Si nous entrons dans le manoir de Couédor nous voyons qu'il remonte à une haute antiquité : la grande salle tout-à-fait ogivale indique le moyen âge, les montants de la cheminée sont du XIIIe siècles, les portes dans le même style , les fenêtres hautes et larges comme on en voyait alors. Une autre preuve nous convaincra qu'il n'y avait pas deux Couédor : Dans les aveux de 1400 et 1500, il est dit que la seigneurie de Couédor avec la terre de Launay contiennent environ de 180 à 200 journaux. Or, d'après des informations sûres, nous pouvons dire que ces deux terres ont exactement 197 journaux. Si donc le Haut Couédor y était compris nous aurions une contenance de plus de 200 journaux. Une dernière preuve qu'il n'y avait pas deux Il est profondément regrettable qu'on ait enlevé le manteau de cette cheminée qui nous eut donné des indications précieuses ; malgré notre bonne volonté, nos recherches sont restées infructueuses. châteaux de Couédor : D'abord le Haut-Couédor n'appartenait pas aux seigneurs de Couédor. A ce sujet nous trouvons, à la date du 4 juin 1578, que N. II. Jean Cado, sieur de Bouac, la Chapelle, demeurant à Ploërmel, vend à François du Loquet, résidant aux Touches, le grand champ du Haut-Couédor. Dans le rôle du Vaumarquer, en 1652,, il est dit : maître Jean Reminiac, sieur du Haut-Couédor, pour fief relevant du Vaumarquer Michel Guesdon et Rose Crosnier, sieur et dame du Vaumarquer, vendent la maison et métairie du Haut-Couédor à Pierre Colas du Tertre le 14 octobre 1734 pour la somme de 2.700 en principal Sans nul doute, le manoir de Couédor fut d'une très grande importance et mérita le nom de château-fort, capable de protéger ses maîtres et de repousser toute attaque. A l'extrémité ouest, il était flanqué d'une tour que nous avons vue et qui a disparu seulement lors de la construction de la maison du fermier ; on en voit même encore la base, qui a peine à se dégager au milieu des ronces et des épines.h- y avait des douves profondes, toujours remplies d'eau, des eaux claires de l'Oyon et qui se voient encore aujourd'hui dans toute leur largeur. On se souvient d'avoir vu le pont-levis et les arcades qui le soutenaient. Sur la ferme actuelle se trouvent les armes des Montboucher, qu'un ouvrier ignorant a renversées ; ces armes proviennent de l'ancienne ferme, ainsi qu'une pierre portant la date de 1604 qui se voit sur la maison du fermier. Ce qui reste du manoir de Couédor est encore imposant et dénote une demeure seigneuriale. Il est facile de voir qu'il a considérablement diminué dans la partie est et qu'il a été abaissé d'un étage, puisque l'escalier principal touche à la toiture et qu'il y a des foyers dans les greniers, autrefois des chambres. 2° Seigneurs dé Couédor. — Les de Couédor ont -ils été seigneurs de Couédor ?... Nous n'avons rien, qui le prouve et cependant les nobiliaires disent :« de Couédor, seigneur du dit lieu, paroisse de Gueir » A ce sujet nous possédons aussi une simple indication, laquelle existe dans un papier où se trouve le rôle pour la seigneurie de Couesbo en l'année 1716. Dans ce papier on lit : « la tenue aux Couédor, aussi la tenue aux Ricaud vault 30 sols monnois !! » On ajoute « due par la seigneurie. » Il nous semble que cette expression veut dire due par la seigneurie de Couédor ; s'il en est ainsi, les de Couédor étaient véritablement seigneurs de cette terre. De plus les de Couédor possédaient le Bois-Glé, les Abbayes, la Fléchaye, Rotilleuc ; or tout près du village de l'Epinay, aujourd'hui Saint-Joseph, et avoisinant le Bois-Glé, il y avait un champ nommé « la pièce du Bois de Couédor ». Ce bois fut vendu par Guillard à Jean de Launay, lequel le revendit à Jean Pèlerin, sieur de l'Espinay, le 19 janvier 1557 Enfin quelques-uns pensent que les de Couédor pourraient bien être juveigneurs ou cadets des Rohan ou Montauban, parce qu'ils ont des macles dans leur blason. La chose ne nous paraît pas impossible, même nous inclinons à l'admettre mais, faute de preuves, nous n'osons l'affirmer. Les Montauban. — Sans doute il serait utile, surtout intéressant, de savoir si les Montauban descendent directement des Montfort, ou bien seulement des Montfort par les Rohan ; mais la question est toujours en litige. Ceux qui soutiennent que les Montauban sont cadets des Montfort ont pour eux des textes, qui, pris dans leur sens obvie, leur donnent raison. Les autres ont pour eux la tradition, la similitude des armoiries parce qu'en effet les Rohan portent « de gueules à 7 mâcles d'or », les Montauban « de gueules à 7 mâcles d'or au lambel de quatre pendants ». En terme de blason le lambel est une brisure dont les cadets chargent en chef les armes de leurs aînés. Les Montfort s'armaient « d'argent à la croix guivrée de gueules », mais pour nous il s'agit simplement de savoir si les Montfort ont été seigneurs de Couédor avant les Montauban comme pour la Gacilly et pour d'autres manoirs féodaux. Nous n'avons rien pour prouver qu'il en fut ainsi ; donc il reste à établir que les de Montauban sont les premiers seigneurs connus et certains de Couédor. Nous avons en août 1280 « dans : Dom Morice » un acte qui reproduit, en entier, un accord entre Olivier Il de Montauban et ses sujets nobles de Guer, établissant le rachat au lieu du simple bail, c'est-à-dire que les dits vassaux s'engageaient à payer le droit de succession au lieu d'une rente annuelle ou pour une période déterminée. Les seigneurs cités sont : « Eon de Pellan, chevalier (eques) ; Pierre de Brambéat, chevalier ; Guillaume de Brambéat ; Guillaume de Houx et Jehan du Houx, son fils ; Raoulet Pillct et Jean Pillet, son « fieu » ; Eon Pillet ; Allain de l'Abbaye ; Pierre Lestre ; Berthelot Coppu et Pierre Coppu, son « fieu » ; Bertrand le Provost et Pierre de la Bouère, écuyer. Cet acte était scellé de 14 sceaux dont le 12e portait une tige fleurie et le 13e un cerf avec les lettres: S. B. T. N. (1). — Ce traité a été trouvé par Dom Morice, dans les papiers des Rohan-Guémené. Le même Olivier, par acte passé en février 1285 devant la Cour de Ploërmel, abandonnait à Guillaume de Lohéae, pour ses bons services, tout ce qu'il possédait dans les paroisses de Comblessac et Mauron (2). En 1256 il lui concédait pour deux ans les revenus qu'il touchait en Montauban, Guer, Carentoir, revenus qui consistaient en bois, moulins, rentes, pour la somme de 70 livres payables en monnaies courantes, cela en deux termes : à la mi-carême puis le 8 septembre ou Nativité de Notre-Dame. Olivier de Montauban, 1er du nom, était fils de Philippe de Montauban et de Gasceline de Montfort, seigneur et dame de Montauban, Binio en Augan, la Gacilly, de l'Eperon en Mohon et Boutavanl. Olivier avait épousé vers 1226 Jeanne de Porhoët, fille de Eudon III, comte de Porhoët,- Josselin et de Marguerite de la Villejagu. Eudon III mourut en 1231, ne laissant que des filles : Mathilde ou Mahaud qui avait épousé en 1204 Geofffroi, comte de Fougères, qui mourut en 1222 ; Aliénor, épouse : 1° de Alain de Rohan, 2°de Pierre de Chemillé, seigneur de Brissac ; Jeanne, épouse d'Olivier de Montauban . ( La succession du comte de Porhoët, ouverte en 1231, ne fut réglée définitivement qu'en 1248. Olivier de Montauban cul du chef de sa femme un quart de ce comté (Dom Morice, Preuves, 1, 890, 907, 919, 934. — Actes de 1231, 1241, 1248). Raoul de Fougères, fils de Geoffroi, eut les deux tiers du comté de Porhoët, avec Josselin, Lanouée et sa forêt cl la paroisse de Mohon, dit M. du Halgouët. Cependant Olivier de Montauban fut certainement apanage en Mohon puisque nous trouvons son petit-fils, Olivier II, changeant le bail en rachat pour ses vassaux de Guer et de Mohon par le même acte de 1280. En opérant cette transformation, il ne faisait que suivre l'exemple et le conseil du duc de Bretagne Jean Ier ou le Roux qui, par lettrés données à Nantes le 10 janvier 1276, avait changé le bail en rachat pour tous ses sujets et l'avait conseillé à ses nobles, pour empêcher la ruine des enfants mineurs nobles dont les biens étaient souvent diminués par l'incurie ou malveillance de leurs tuteurs. Olivier III de Montauban avait épousé secrètement, vers 1301, Julienne de Tournemines, sa parente du 3e au 4e degré. Julienne de Tournemines était veuve de Raoul V de Montfort, mort en 1300, et fille de Geoffroy, seigneur de la Hunaudaye. Elle reçut en douaire, septembre 1314, 240 livres de rente assises sur les terres que son mari, Olivier III, possédait en Landujan, Le Loû, La Chapelle-du-Loû, Irodouër et Saint-M'Dervou ; mais son mariage ne fut légitimé qu'en décembre 1320, par une bulle du pape Jean XXII, bulle qui devait être lue et affichée dans les églises de Montauban, Montfort et Guer. La terre de Couédor resta dans la famille de Montauban jusqu'à Marie de Montauban. Elle était fille de Jean III qui avait épousé, vers 1420, Anne de Kérennais. Anne de Kérennais était fille unique d'Eon, chevalier, seigneur de Kérennais, de la Rigaudière et de Jeanne Plusquellec. Marie de Montauban épousa, le 24 avril 1443, Louis de Rohan, seigneur de Guémené, fils de Charles et de Catherine du Guesclin, dame de la Roberie, auquel elle apporta toutes les seigneuries de la branche aînée des Montauban. Elle ne laissa qu'une fille, Hélène de Rohan, qui épousa, en 1463, Pierre du Pont, seigneur de Pont-Labbé. selon M. de la Borderie, Olivier de Montauban dont nous parlons ici serait Olivier II de Montauban, fils de Philippe, arrière-petit-fils d'Olivier de Montfort, dit Olivier Ier de Montauban. Olivier Ier de Montauban vivait, dit-il, d'après des actes, en 1160 et 1184. — Amaury, son fils, en 1204 et 1214. Philippe, — en 1204, 1215, 1230. — Olivier II, en 1220 et 1248, etc. ( Voir : la Seigneurie de Montauban, p. 27). Le P. du Paz dit qu'Olivier Il était seigneur de Montauban en 1275 et qu'il mourut en 1284. A notre avis, la généalogie des sires de Montauban par M. de la Borderie est bien établie et repose sur des actes authentiques et des dates sûres. Il nous semble, avoir raison. D'ailleurs cela n'importe pas pour la véracité de notre récit. Que ce soit Olivier Ier ou Olivier II : c'est toujours un Olivier de Montauban. LES LAUNAY. D'après les réformations, il y avait, dans la paroisse de Guer, deux seigneuries portant le nom de Launay : Launay près Couédor et Launay-Rolland. L'une d'elles aurait-elle donné son nom à la famille Le Provost de Launay ? Nous inclinons à le croire, sans oser l'affirmer, LAUNAY-COUÉDOR, Cette seigneurie importante se trouvait très rapprochée de Couédor, établie au village de Launay-Couédor, aujourd'hui en Porcaro. Quel en fut le premier seigneur ? Est-ce Bertrand Le Provost que nous voyons en Guer, en 1280 ? Ce n'est pas probable. Il est plus probable qu'elle appartint, de très bonne heure, à la famille de Montfort, comme un grand nombre de seigneuries de ce pays. En 1426, la réformation dit : « La femme de Jean de Vitré à son hôtel de Launay. » Or, ce Jean de Vitré n'était autre que Jean de Montfort, fils de Raoul et de Jeanne de Kergorlay, fille de Jean et de Marie de Léon. Sa femme s'appelait Anne de Laval, fille de Guy XII et de Jeanne de Laval, dame de Châtillon. Anne de Laval était seule héritière du comte de Laval et de la Baronnie de Vitré. Vitré était advenu aux de Laval par le mariage de Philippe de Vitré, seule héritière, avec Guy VII, comte de Laval (1). Le mariage de Jean de Montfort avec Anne de Laval, dame de Laval et Vitré, avait eu lieu le 22 janvier 1404. Dans le contrat de mariage, il fut stipulé que Jean de Montfort abandonnerait son nom, pour prendre : « bannière, nom, cry et armes de Laval » qui sont : « d'or à la croix de gueules chargée de cinq coquilles d'argent, cantonnées de seize Allerions. »Le contrat fut passé au château de Vitré, en présence du Duc et de son conseil, des seigneurs de Châteaubriant, de Quentin, de Combourg et autres parents ; Jean reçut le nom de Guy et fut Guy XIIIe, en 1412, après la mort de son beau-père. Il mourut à Rhodes le 12 août 1414 ; sa femme, en 1466, le 28 janvier. D'après M. Galles, Anne de Laval n'était plus dame de Launay en 1427. Selon lui, en cette année, Launay était à Jean d'Acigné et à Catherine de Malestroit, son épouse, qui mourut à Rennes, en 1434, et fut inhumée dans l'église des Cordeliers de cette ville. Ils furent père et mère de Jean d'Acigné qui épousa Béatrix de Rostrenen, dame de Guer et Couédor. Ce mariage unit et confondit pour ainsi dire la seigneurie de Launay avec celle de Couédor. L'aveu de 1464 dont nous avons parlé les déclare unies, avec Couédor pour centre. Elles n'ont cessé de l'être jusqu'à la Révolution