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Seigneurie
Bossac
BRUC-SUR-AFF
35550
Ille-et-Vilaine
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situé sur le territoire de Bruc-sur-Aff et qui date du début du XIVème siècle, est en ruines dès le XVème siècle. Les seigneurs les plus influents de la paroisse sont La Boulaye et Du Bois-Orhant. Du château de Bossac construit en la paroisse de Bruc, mais sur les limites de Pipriac, au bord du ruisseau de Canut, il ne demeure qu'un vague souvenir, des moulins et un étang portant encore le nom de la vieille forteresse. Dès le XVème siècle, d'ailleurs, ce château était complètement ruiné et en 1478 on n'en voyait plus que « la situation consistant tant en douves qu'en emplacement d'iceluy chasteau, et contenant un journal de terre » (Archives de Loire-Inférieure). Mais à quelque distance de là, dans la paroisse même de Pipriac, s'élevait en la trêve de Saint-Ganton un manoir d'une certaine importance, nommé la Thébaudaye : cette maison était dès 1440 la demeure des sires de Bossac et les deux seigneuries de Bossac et de la Thébaudaye ne formèrent dès lors qu'une seule châtellenie ou baronnie. La famille de la Motte portant « de vair au lambel de gueules » — ce qui semble indiquer un ramage de Lohéac (nota : les barons de Lohéac portaient : de vair plein). — paraît la première en possession de la seigneurie de Bossac. Robert de la Motte, sire de Bossac, jura en 1379 l'association pour empêcher l'invasion étrangère en Bretagne ; il épousa Mahaud de Rieux, fille de Jean, sire de Rieux. Leur fils, Louis de la Motte, s'unit en 1416 à Marguerite Anger, fille du seigneur du Plessix-Anger en Lieuron ; cette dame mourut veuve, le 17 juin 1436 (Dom Morice, Preuves de l'Histoire de Bretagne, II, 214 et 1298). Ysabeau de la Motte, fille des précédents, apporta Bossac à Geffroy du Perrier, seigneur de la Roche d'Iré, qu'elle épousa avant 1412 ; c'était le fils de Jean du Perrier, sire de Quintin. Les deux époux rendirent aveu au duc de Bretagne pour la seigneurie de Bossac le 25 mai 1440, et Ysabeau de la Motte décéda le 16 juin 1474. Tristan du Perrier, leur fils, comte de Quintin et seigneur de Bossac, fut l'un des plus distingués chevaliers de son temps : il mourut le 24 décembre 1482, ne laissant de son union avec Ysabeau de Montauban qu'une fille nommée Jeanne (Archives de Loire-Inférieure). Cette Jeanne du Perrier, dame de Quintin et de Bossac, épousa : - 1er en 1472, Jean de Laval, baron de la Roche-Bernard, dont elle eut Guy XVI, comte de Laval ; - 2° Pierre de Rohan, baron de Pontchâteau, dont naquit Christophe de Rohan, mort sans postérité. Pierre de Rohan semble avoir aimé à résider à la Thébaudaye pour laquelle il rendit aveu en 1500 et où il demeurait en 1513 ; il mourut le 23 juin 1518. La baronnie de Bossac passa dès lors à Guy XVI, comte de Laval, qui épousa Antoinette de Daillon. Cette dame réclama en 1533, après la mort de son mari, pour Charlotte de Laval, sa fille, dame de Bossac, dont elle était tutrice, l'honneur réservé depuis plusieurs siècles aux seigneurs de Bossac de porter l'un des bâtons du dais ducal lorsqu'avait lieu le couronnement des ducs de Bretagne. Sa requête fut favorablement accueillie, et René de Tournemine, procureur de la dame de Bossac, tint ce bâton à la cérémonie du couronnement de François III à Rennes. Charlotte de Laval, dame de Bossac, épousa en 1547 le célèbre amiral de France Gaspard de Coligny ; elle mourut en 1568 et son mari fut massacré, comme l'on sait, à la Saint-Barthélemy, en 1572. Ils laissaient, entre autres enfants, Louise de Coligny, femme de Charles de Téligny, qui semble avoir possédé quelques années la terre de Bossac, car en 1578 elle présenta le prieuré de la Lande en Pipriac, en sa qualité de dame de Bossac ; mais, soit qu'elle est décédé sans enfants, soit par suite d'un arrangement de famille, la seigneurie de Bossac ne tarda pas à passer au frère aîné de cette dame, François de Coligny, marié en 1581 à Marguerite d'Ailly (Moreri, Dictionnaire historique). La fille de ces derniers, Françoise de Coligny, reçut en partage la châtellenie de Bossac, épousa en 1602 René de Talensac, seigneur des Loudrières, et devenue veuve disputa avec avantage au seigneur de Renac les droits honorifiques dans l'église de Pipriac. Elle appartenait néanmoins à une famille longtemps à la tête du protestantisme en France ; elle mourut en 1637, après avoir vendu ses terres et seigneuries de Bossac et de la Thébaudaye. Ce fut le morcellement de la baronnie de Bossac ; déjà en 1599 Marguerite d'Ailly en avait distrait les fiefs de Saint-Malo-de-Phily pour le seigneur de la Driennaye ; l'acte de vente de Mme de Talensac fut passé le 18 juin 1630 en faveur de François Peschart, seigneur de Bienassis en Pipriac, et de Jean Becdelièvre, seigneur du Bouexic en Guipry. Ces deux acquéreurs se partagèrent, le 29 novembre suivant, la baronnie. François Peschart conserva les domaines proches de Bossac et de la Thébaudaye, ainsi que les fiefs en Bruc et Pipriac ; Jean Becdelièvre eut en partage tous les fiefs en Guipry. François Peschart, devenu ainsi baron de Bossac, était fils de Louis Peschart et d'Anne de Castellan, seigneur et dame de Bienassis. Il avait épousé d'abord Renée de Vaucouleurs, dont il eut Jean Peschart, baron de Beaumanoir, décédé sans postérité à Rennes et inhumé dans l'église de Pipriac le 4 août 1634 (nota : Le baron de Beaumanoir, conseiller au Parlement de Rennes, avait fait, avant de mourir, au couvent de Bonne Nouvelle de Rennes, une fondation qu'exécuta son père après son décès). Il se remaria avec Georgine Tillon et vint avec elle habiter le manoir de la Thébaudaye. Ils y eurent un fils nommé Jean, baptisé en 1636 dans l'église tréviale de Saint-Ganton, et en 1642 ils fondèrent deux messes hebdomadaires en la chapelle de leur manoir. Tous deux moururent à la Thébaudaye et furent inhumés dans le chanceau de l'église de Saint-Ganton, de chaque côté du maître-autel : Georgine Tillon le 16 décembre 1648, et François Peschart, le 6 avril 1649. Leur fils cadet Gabriel devint alors seigneur de Bossac et épousa à Nantes, le 30 avril 1661, Renée Dollier de Casson, fille du seigneur de la Dévoriaye en Fougeray ; de cette union sortirent au moins sept enfants, deux garçons et cinq filles, baptisés tous à Saint-Etienne de Rennes. Chevalier du Montcarmel et de Saint-Lazare, Gabriel Peschart habita tantôt Rennes, tantôt la Thébaudaye ; mais il eut des différents très graves avec Louis du Bouexic, seigneur de Pinieux ; chassé de son manoir où sa femme était retenue prisonnière, il voulut y rentrer et fut assassiné dans la cour même de la Thébaudaye, le 1er septembre 1692, par deux gentilshommes du pays. Une de ses filles, Marie-Louise Peschart, qui mourut à Versailles en 1701, essaya, mais en vain, de conserver le manoir paternel. Dès 1696 la baronnie de Bossac et la terre de la Thébaudaye furent saisies par les créanciers de Gabriel Peschart ; le tout fut vendu judiciairement et acheté par Noël Danycan et Marguerite Chantoyseau, sa femme, très riches armateurs de Saint-Malo. La fille de ces derniers, Guyonne-Marie Danycan, en épousant, le 17 juin 1704, Charles Huchet, seigneur de la Bédoyère, lui apporta la baronnie de Bossac ; procureur général au Parlement de Bretagne, celui-ci mourut en 1759, laissant Bossac à son fils Hugues-Charles Huchet, comte de la Bédoyère, mari d'Agathe Sticotti. Ces derniers moururent à Rennes, M. de la Bédoyère en 1786 et sa veuve l'année suivante. Leur fils aîné Corentin-Charles Huchet, marquis de la Bédoyère, avait épousé dans l'église de Saint-Ganton, le 17 mars 1779, Reine-Perrine Rado de Cournon. Il donna vraisemblablement en partage la baronnie de Bossac à l'un de ses frères cadets Antoine-Pierre Huchet de la Bédoyère qui fut, en tout cas, le dernier seigneur de Bossac et la Thébaudaye. Celui-ci ayant émigré, ses biens furent vendus nationalement le 8 thermidor, an IV, et la Thébaudaye fut rachetée par son frère M. Huchet de la Besneraye. Selon M. de Courcy, Bossac fut « érigé en vicomté en 1637 pour Jean Peschart, baron de Beaumanoir » (Nobiliaire de Bretagne, I, 124, et II, 439). Nous ne croyons pas la chose certaine : d'abord Jean Peschart, baron de Beaumanoir, mourut en 1634, et en 1637 Bossac appartenait à François Peschart ; puis tous les anciens titres de Bossac font de cette terre une châtellenie ou une baronnie d'ancienneté, aucun ne la qualifie de vicomté. Il est probable que M. de Courcy a confondu entre elles les deux sections de la seigneurie de Bossac divisée, comme nous l'avons dit, en 1630 ; l'une d'elles fut bien érigée en vicomté en 1637 en faveur de Jean Becdelièvre, mais ce fut pour former avec d'autres fiefs la vicomté du Bouexic ; l'autre conserva avec le domaine proche de Bossac son titre d'ancienne baronnie. Ce domaine proche de Bossac se composait dès 1478 comme en 1619 de ce qui suit : « les murailles, mazières, lieu et emplatz du chasteau ancien de Boczac, cours, douves et clostures d'iceluy situé en la paroisse de Bruc » ; « les manoir et mestairie de Bossac adjacents ledit emplacement du chasteau » ; — « le chasteau et manoir de la Thébaudaye consistant en un grand corps de logis basti de neuf (en 1619) avec ses cours devant et à costé, chapelle, écuries, pavillons, colombiers, jardins, etc. » ; — la métairie de la Rochelle (nota : les sires de Bossac avaient donné aux religieuses du prieuré de Saint-Germain-des-Prés près de Lohéac une rente de se boisseaux de seigle pris sur cette terre ; c'est ce qu'on appelait la chapellenie de la Rochelle, dont jouissait en 1789 l'abbaye de Saint-Sulpice près de Rennes) ; — les grand et petit parcs de la Thébaudaye « en partie cernés de murs » contenant l'un 80, l'autre 20 journaux ; — les bois futaies de Bossac (48 journaux) et de la Thébaudaye ; celui-ci partie en taillis, mais contenant 100 journaux ; les anciens moulins à eau de Bossac, sur l'étang de ce nom, de Saint-Séglin sur l'Aff, et du Moulin-Allain ; — les moulins à vent de la Rochelle, de la Boce et de la Touche-Raoul ; — divers traits de dîmes à la dixième gerbe en Pipriac, Saint-Ganton et Bruc. La baronnie de Bossac, relevant prochement du duc de Bretagne, puis du roi de France, se composait d'une demi-douzaine de grands bailliages subdivisés en de nombreux fiefs. Le tout s'étendant en Pipriac et Saint-Ganton sa trêve, Bruc, Guipry et Saint-Malo-de­Phily ; ces fiefs rapportaient en 1787 : par argent, 556 livres 12 sols, plus 2 000 boisseaux d'avoine, 250 boisseaux de seigle et 43 boisseaux de froment. Plusieurs droits féodaux assez originaux y appartenaient, en outre, au baron de Bossac de qui relevaient un bon nombre de terres nobles et sept seigneuries inférieures : au bailliage de Bruc, le seigneur de Fesgon devait « au terme d'aoust un espervier garny de sonnettes et un gand à porter oiseau, à peine d'un escu d'or » ; les détenteurs d'un jardin au bourg de Bruc devaient au même terme « une douzaine d'aiguillettes de soye, la moitié rouge ferrée de noir et l'autre moitié noire ferrée de jaune et orangé ». — Au bailliage de Senac en Pipriac, le seigneur de la Pipelaye devait « 20 sols de cire à la Saint-Michel Mont-Gargan et une paire de gants blancs le premier jour de l'an ». — Au bailliage de Bréhilly, aussi en Pipriac, les détenteurs du fief de la Costardaye et ceux de la maison de la Bouverie devaient également donner « une paire de gants blancs » (Aveu de 1619). Mais voici un droit bien plus singulier sur la fabrique et le recteur de Pipriac. Au bailliage de la Prévostière en Pipriac le baron de Bossac avait droit de fondation et patronage des églises de Pipriac et de Saint-Ganton, et des chapelles de Saint-Amand au bourg de Pipriac et de Saint-Michel au bourg de Saint-Ganton, ainsi que de l'église de Bruc et de la chapelle priorale de la Lande. « Mesme a droit le dit seigneur, quand arrive à Pipriac vacation de recteur, d'avoir par les mains des fabriqueurs et trésoriers les clefs d'icelle église, lesquelles clefs iceux sont tenus porter au dit seigneur à son manoir de la Thébaudaye, pour le dit seigneur bailler les dites clefs à personne idoine pour l'administration des sacrements en icelle église jusqu'à ce que la dite église soit fournie de recteur ; lequel recteur, lorsqu'il est duement pourvu est tenu venir vers le dit seigneur pour avoir les dites clefs, et en recognoissance de ce le prochain dimanche après sa possession prise, icelui recteur doit au dit seigneur 25 sols monnaye èsquels y a 5 sols en double deniers qui sont jetés à l'issue de la grand'messe dudit jour au cimetère de Pipriac par le dit seigneur aux paroissiens et peuple y congrégés. Et aussi au dit jour de la possession prise de son bénéfice, doit et est tenu le dit recteur bailler et délivrer aux tenanciers du village de la Touraudaye en la dite paroisse, qui sont hommes de la seigneurie de Bossac, tous et chacun ses habits et accoustrements qu'il a sur lui au temps de la dite prise de possession, réservé chausse, pourpoint, chemise et souliers, pour reconnaissance de ce que iceux tenanciers paient audit recteur la dime du consentement des prédécesseurs du dit seigneur auxquels jadis elle appartenoit » (Aveux de 1619 et 1677. — Le dernier recteur de Pipriac avant la Révolution, M. David, acquitta ce singulier devoir en 1787, en laissant « ses nippes d'usage, c'est-à-dire son chapeau, sa soutane et mène sa ceinture »). Le seigneur de Bossac avait droit de faire courir quintaine « de sept ans en sept ans les hommes mariés en Pipriac (depuis ces sept ans) au lieu accoustumé au bourg de ce nom », et chaque coureur après avoir rompu sa lance, devait cinq boisseaux d'avoine au baron ; le seigneur du Boishulin en Pipriac était tenu ce jour-là de fournir aux quintainiens « le rocquet et l'écu nécessaires », mais le sire de Bossac fournissait les chevaux. Au bourg de Pipriac se trouvaient l'auditoire où s'exerçait la haute juridiction de Bossac, la prison et les ceps et colliers ; les propriétaires des trois maisons de la Bouverie, du Collier et de la Bassecour devaient, en outre, garder au besoin, chacun pendant vingt-quatre heures, les prisonniers ou malfaiteurs saisis par la justice seigneuriale. Le lundi de Pâques tous les « nouveaux mariés depuis l'an » de la paroisse de Bruc étaient tenus de chanter une chanson et d'offrir aux officiers de leur seigneur « une fouace et un pot de vin breton » (Aveux de 1619 et 1677). Enfin au seigneur de Bossac appartenait le droit de tenir un marché à Pipriac tous les mardis, et deux foires, l'une le jour Saint-Amand au bourg de Pipriac, l'autre à la Saint-Eutrope au bourg de Saint-Ganton. Actuellement du château de Bossac il ne subsiste rien, avons-nous dit ; du manoir de la Thébaudaye il demeure quelques ruines insignifiantes. Il fut brûlé par la malveillance en 1790 et l'on aperçoit ses derniers débris au centre d'un grand carré de murailles flanquées de six tourelles et de quatre pavillons. Sans être une forteresse, la Thébaudaye était donc assez bien défendue pour résister à un coup de main armée, mais elle fut victime des torches incendiaires qu'alluma la Révolution (abbé Guillotin de Corson).